Ne comptons pas sur Emmanuelle Wargon, secrétaire d’Etat à l’Environnement, pour interdire la commercialisation de l’eau en bouteille plastique à usage unique, ou autre mesure prenant en compte l’urgence climatique dans laquelle nous nous trouvons actuellement. A voir le fonctionnement et l’éthique de l’entreprise qu’elle quitte, les générations futures ne sont probablement pas pour elle un sujet de préoccupation majeur…
Il y a d’abord les vieilles casseroles de Danone : en 2015, l’émission « Cash Investigation » exposait la stratégie marketing de la filiale indonésienne de Danone, accusée de commercialiser du lait en poudre dans un pays où l’eau n’est presque jamais potable.
Et puis il y a eu l’épisode de la COP21 : militants et agriculteurs avaient manifesté devant le siège de Danone pour dénoncer son modèle d’agrobusiness « climaticide ». De fait, l’objectif principal de l’entreprise ne contenait aucun engagement concernant son mode d’agriculture, pesant pour près de 60 % de son empreinte carbone. Et avec une échéance à 2025 pour arrêter d’augmenter ses émissions réelles globales, l’entreprise s’autorisait à émettre des quantités encore plus importantes de gaz à effet de serre pendant les 10 prochaines années… “Il est consternant de voir Danone, une des plus importantes entreprises françaises, faire un tel flop sur le climat avant la COP à Paris”, avait déclaré Jean-Cyril Dagorn, responsable de plaidoyer à Oxfam France. “Danone se contente de mesurettes. La planète ne peut pas se permettre d’attendre 10 ans pour que les entreprises agissent sur la crise climatique en cours aujourd’hui.”
Et depuis ? Danone a bien vu que tout cela pouvait lui porter préjudice… et a montré qu’elle voulait rectifier le tir, à grands renforts de communication. Le 21 septembre dernier, le géant français de l’agroalimentaire reversait ainsi tout son chiffre d’affaires réalisé en France ce jour-là, soit environ 5 millions d’euros, au Fonds Danone pour l’écosystème, un « fonds de dotation pour soutenir des activités d’intérêt général », selon l’entreprise. Et puis Danone a diffusé (qui a dû coûter quoi ? 5 millions d’euros peut-être ?) avec une baseline très, très arrogante pour qui connaît le Groupe : « chaque fois que nous mangeons et buvons, nous votons pour le monde dans lequel nous voulons vivre ». L’objectif annoncé par Danone avec ce coup de comm grossier ? Soutenir une « agriculture régénératrice », sans pour autant en préciser exactement le sens. « Nous travaillons avec le WWF France et Pour une agriculture du vivant pour en définir les principes pour notre amont agricole », a signalé Danone. Qu’il n’hésite pas à nous tenir informés lorsqu’il aura défini ce dont il voulait parler…
En attendant d’être le champion de l’agriculture régénératrice, Danone, c’est surtout le champion de l’aliment ultra-transformé. Quatre représentants de Danone étaient auditionnés cet été à l’Assemblée nationale par la commission d’enquête sur l’alimentation industrielle et les produits ultra-transformés, lesquels sont soupçonnés d’être une cause de diabète, d’obésité et de certains cancers… Alors que le groupe agroalimentaire n’a de cesse de communiquer sur ses « alicaments », des aliments censés apporter un véritable « plus » en matière de santé pour qui les consomme régulièrement.
Les aliments ultra-transformé ? Selon 60 millions de consommateurs, ce sont des aliments « dont la particularité est d’être fabriqués avec très peu de matières premières brutes (fruits, lait, viande…) et beaucoup d’additifs ou d’ingrédients reconstitués dans le but de leurrer le goût du consommateur et d’obtenir un produit facile à utiliser ». On reconnaît l’aliment ultra-transformé à sa liste sans fin d’ingrédients d’origine industrielle, indéchiffrable pour le consommateur, illisible tant c’est écrit petit. Ces denrées qui représentent la moitié de l’offre en supermarché, Anthony Fardet les appelle « fake food » (« fausse nourriture », en français). Et des produits ultra-transformés, Danone en produit beaucoup : Danette, Actimel, Activia fruits, Danacol 0% pêche abricot, yaourt à boire Danao, Taillefine aux fruits… En guise d’exemple, le Taillefine 0% fraise de Danone ne contient pas moins de neuf additifs sous son joli packaging. Et le hors-série de « 60 Millions de consommateurs » paru en avril sur « Les aliments qui nous empoisonnent » épingle également le yaourt de Danone M&M’s Mix pour son nombre impressionnant d’additifs : commercialisé en Europe mais pas en France, il compte quelques 16 additifs…
Evidemment, Danone se défausse sur la question des additifs : selon la firme, chaque additif a une « fonctionnalité spécifique » et ceux utilisés par le groupe sont autorisés. Mais « autorisé » signifie-t-il « bon pour la santé » ? Point du tout. Car il y a « l’effet cocktail » : un additif présent dans le produit peut exacerber les effets négatifs d’un autre additif, et quand on sait que 338 additifs différents sont autorisés dans les plats cuisinés, on ne sait pas trop ce qui se retrouve dans notre corps après un yaourt Danone au petit déjeuner, un sandwich sous plastique au déjeuner, une pâtisserie industrielle au goûter et un plat cuisiné réchauffé au micro-ondes au dîner (et oui, ce n’est peut-être pas le cas pour vous, mais c’est le cas, malheureusement, pour beaucoup). Bref, on ne sait pas trop mesurer l’effet cocktail… Faute d’étude sur le sujet, même si l’INRA et l’INSERM ont commencé à plancher sur le sujet. Il est d’ailleurs intéressant de réaliser qu’une firme comme Danone, qui emploie des scientifiques sur-diplômés et effectue un important travail de veille sur la recherche au niveau international, ne cherche pas à en savoir plus sur la question… Et c’est d’autant moins rassurant méthodologiquement parlant, alors que l’on vient d’apprendre la nomination d’Emmanuelle Wargon, directrice des affaires publiques et de la communication de Danone, comme secrétaire d’Etat à l’Environnement…
Une dernière petite nouvelle pour la route ? Suite à la tenue de 239 nettoyages et enquêtes de marques dans 42 pays et sur 6 continents, Greenpeace et Break Free From Plastic viennent de répertorier 187.000 déchets plastiques, et de déterminer leur provenance. Résultat de l’étude ? Danone est le 4ème des 10 plus grands pollueurs au monde après Coca-Cola, PepsiCo, et Nestlé… Cela ne vous étonne pas ? Nous non plus. Evian, Volvic, Badoit, Salvetat… Tout ça, c’est Danone. On vous donne juste les chiffres pour Evian ? Chaque année, près de 2,2 milliards de bouteilles d’Evian sont consommées dans le monde. Autrement dit, 6 millions de bouteilles quittent chaque jour le site d’Evian, filiale de Danone… Et finissent, un jour sur les plages, et puis dans l’océan, et jusque dans l’estomac de la faune qui n’y habitera bientôt plus si ça continue. Et ça a toutes les chances de continuer, puisque Danone n’a pas l’intention de sortir de sa politique du plastique jetable et d’éliminer sa production du plastique à usage unique, ou d’investir dans des systèmes de livraison basés sur des modèles de récupération et de réutilisation, ou de prendre quelque responsabilité que ce soit pour gérer le cycle de vie de ses produits…
Cela vous donne envie de réagir ? Rejoignez le mouvement, nous sommes plus de 25.000 à vouloir donner plus de poids à nos décisions de consommateurs, et à nos convictions de citoyens… Chaque jour, Boycott Citoyen ajoute une marque à la liste noire des produits dont nous ne voulons plus, au nom de notre avenir.